Un tiers des galeries d’art françaises pourraient être contraintes de fermer avant la fin de l’année 2020, prévient leur association professionnelle, le Comité professionnel des galeries d’art. L’enquête du comité révèle l’ampleur des pertes économiques déjà causées, estimant leur montant à près de 184 millions d’euros pour ce trimestre.

L’art enregistre des pertes record à cause du coronavirus

Cette conclusion est le résultat d’une enquête menée auprès des 279 membres du comité. Première enquête de ce type sur l’impact de la pandémie sur le secteur, l’enquête a reçu 168 réponses. Les pertes totales de mars à juin pour l’échantillon devraient atteindre 184 millions d’euros, y compris les pertes partielles ou complètes sur les investissements pour les expositions et les foires ainsi que la baisse attendue des ventes, par rapport à la même période de l’année dernière.

« Je n’ai pas entendu parler d’une seule vente depuis la mi-mars », déclare Marion Papillon, qui préside le comité professionnel des galeries d’art. Elle ajoute que de nombreuses ventes négociées lors des dernières foires avant la fermeture généralisée, comme le Tefaf Maastricht ou l’Armory Show de New York, ont été annulées. Ce deuxième trimestre de l’année, normalement stimulé par les foires d’art dans le monde entier, a représenté 37% des revenus de 2019 de tous les membres du syndicat (totalisant environ 170 millions d’euros) et Mme Papillon craint que ces revenus ne soient complètement anéantis par la poursuite du confinement. Elle ajoute : « Les foires devront également s’adapter. Il est impossible qu’elles puissent appliquer les mêmes conditions compte tenu de la diminution de l’activité qui est prévisible dans les prochaines années ».

« De nombreuses entreprises disparaîtront »

De nombreuses entreprises ne survivront pas. Le consultant français en management Pierre Marin et l’économiste Nathalie Moureau, qui a dirigé l’étude, soulignent la fragilité d’un réseau qui repose sur les petites entreprises. Deux tiers d’entre elles ont moins de deux employés, quatre sur cinq représentent moins de 29 artistes (ce qui signifie qu’au total, les membres du comité soutiennent environ 6 500 artistes qui seront également touchés par la crise).

Un dixième seulement des répondants ont un chiffre d’affaires de plus de 3 millions d’euros par an et beaucoup sont de jeunes entreprises – plus de la moitié n’ont ouvert que depuis 2000. « Les coûts fixes, comme le loyer et les salaires, sont proportionnellement beaucoup plus lourds pour les plus petites entreprises », explique M. Papillon, qui estime que l’aide de l’État français « est insuffisante pour faire face à une telle crise ».

Le ministère français de la Culture n’a promis que 2 millions d’euros d’aide spéciale pour les galeries, les centres d’art et les artistes, en plus du soutien budgétisé du fonds public pour l’art contemporain de 600 000 euros sur les achats des galeries et de 500 000 euros sur les commandes des artistes. M. Papillon souligne que les arts et la culture sont beaucoup plus fortement soutenus en Allemagne ou en Asie qu’en France.

Le plan massif d’aide aux entreprises, affirme M. Papillon, « aidera nos entreprises à le supporter pendant la période de fermeture, mais nous savons par expérience que l’impact durera des années ». Le rapport souligne qu’une étude précédente sur l’impact du krach du marché de l’art en 1990 a montré que la reprise n’a commencé qu’en 1995. Entre-temps, 46% des galeries en France avaient disparu.