La peinture de la vanité, en avez-vous déjà entendu parler ? C’est un type de peinture particulier d’une grande valeur symbolique. Nous en disons plus dans la suite de cet article.
Vanité : définition de ce type de peinture… peu orthodoxe
La peinture « vanité » est une représentation d’une pensée sous une forme imagée afin de faire comprendre au public que l’orgueil démesuré de l’être humain est vain et précaire. L’homme peu importe les richesses qu’il accumule, son statut ou son rang social, ne pourra échapper à la mort et n’emportera absolument rien avec lui dans sa tombe.
Cette peinture est un genre particulier de nature morte à très grande valeur symbolique. Elle se développe au XVIIe siècle plus précisément dans la peinture hollandaise à l’époque baroque.
Le terme est tiré de la sentence de l’Ancien Testament plus exactement du livre de l’Ecclésiaste avec l’expression « vanité des vanités tout est vanité ».
Comment reconnaître une vanité en peinture ?
La peinture Vanité encore appelée peinture de la mort à des caractéristiques particulières qui permettent de l’identifier assez rapidement. On retrouve généralement sur les peintures « vanités » des objets symboliques du vide de l’existence terrestre. On peut y retrouver de l’argent ou des bijoux qui évoquent la richesse, une pipe ou des aliments (jambon, fromage), des jeux ou des instruments de musique qui symbolisent l’opulence et le plaisir. Ces objets sont disposés généralement à côté d’un crâne humain (symbole incontournable et emblématique des vanités), d’une horloge, d’un sablier, d’une bulle de savon, d’une bougie qui se consume ou des fleurs fanées. Tous ces objets font ressortir l’imminence de la mort avec le temps qui défile, le temps qui s’écoule dans le sablier, la bougie qui se consume et qui va bientôt s’éteindre et la vie qui va prochainement s’estomper sans retour possible.
Le tableau est parfois empreint de spiritualité avec des symboles de résurrection et de vie éternelle (des épis de blé, une couronne de laurier).
Les peintures « Vanité » ont pour unique but de faire ressortir le caractère imminent et inéluctable de la mort.
Quelques exemples de vanités célèbres
La plupart des peintres hollandais ont produit des portraits « vanités ». Au nombre de ceux-ci nous pouvons citer parmi les œuvres les plus célèbres :
- Vanité, de Philippe de Champaigne (1602-1674) ;
- Vanité, de Simon Renard de Saint-André (1650) ;
- Vanité au Spinario, de Pieter Claesz (1628) ;
- Saint-Jérôme écrivant, Le Caravage (1606) ;
- Schädel (Crâne), de Gerhard Richter (1983) ;
- Vanitas, Still Life, de Pieter Claesz 1630 ;
- Nature morte au crâne, de Pieter Claesz (1628) ;;
- Vanitas: Still-Life with a feather fan de Juriaen van Streeck (1670) ;
- Still Life de Salvator Rosa (1673) ;
- Vanitas de Cornelis Norbertus Gysbrechts, (XVII è Siècle) ;
- Three skulls on a patterned carpet de Paul Cézanne (1900) ;
- Composition with skull de Pablo Picasso (1908).
Les vanités dans l’art contemporain
Les deux guerres mondiales meurtrières du XXe siècle, qui ont engendré beaucoup de massacres et de tueries ont remis en question et désagrégées les grandes pensées humanistes qui avant cette époque était encore d’actualité. L’apparition du capitalisme a sans nul doute créé un nouveau rapport avec la mort. Pour représenter et exprimer toute cette violence, les artistes de l’époque vont trouver une nouvelle façon de représenter et d’illustrer le passage de la vie à la mort.
Dans l’art contemporain, les styles et les matériaux utilisés ont connu une véritable diversification, aux antipodes des objets symboliques et des glacis des œuvres hollandaises du XVIIe siècle qui respectaient les codes moraux, les stéréotypes et dogmes religieux de l’époque. Il y a donc eu une certaine liberté d’expression dans les œuvres contemporaines. Cette liberté peut tout de même influer sur l’interprétation que peut faire le spectateur et peut le dérouter même si l’artiste met un titre bien précis sur son œuvre.
Les vanités du XVIIe siècle respectaient des règles de dispositions des objets et avaient pour vocation principale de rappeler au spectateur l’inéluctabilité de la mort en faisant recours aux idéaux philosophiques, moraux et religieux. Les Vanités contemporaines par contre se démarquent de cette rigueur même si elles conservent certains objets symboliques tels que le crâne, mais les désacralisent en les associant à des objets ridicules, voire grotesques.
Le fossé est donc très grand entre les vanités classiques et celles actuelles. Les vanités classiques pouvaient être aisément classifiées dans un même genre. Les vanités contemporaines par contre sont assez imprévisibles sans style particulier laissé à la discrétion et à l’imagination ubuesque de chaque artiste. Elles ont donc des genres multiples à l’inverse des vanités classiques qui constituent un genre à elles seules.
Notre période actuelle est le symbole même de la désacralisation de toute chose (croyance, religion, courant de pensée). Les vanités contemporaines y trouvent toute leur place puisque mêlant matériaux éphémères, objets en état de putréfaction, objets en plastique et d’autres objets qui annihilent même la pureté et le but de la peinture.
D’une très grande variété, elle n’a plus forcément recours aux objets et symboles consacrés de l’époque classique. Elle donne généralement l’aspect de scène inachevée et laisse le spectateur tirer ses propres conclusions
Vanité se détache donc des peintures classiques pour revêtir d’autres formes d’art à savoir la sculpture, la photographie, la vidéo. Le temps occupe une grande place également et les artistes accordent une réelle importance à mettre en avant les matières réelles comme exposer des aliments qui vont pourrir en temps réel par exemple.
Le rapport avec la mort est donc plus brutale.il y a moins de tabous et moins de subtilité. On peut voir un animal en pleine décomposition par exemple sur l’œuvre de Jake et Dinos Chapman intitulé Sex III. La mort est également illustrée de façon collective avec les meurtres de masse dans les camps de concentration et d’extermination des Juifs. Le crâne humain est alors la parfaite illustration de ce massacre.
Quelques vanités célèbres de l’art contemporain
- Campbell’s Soup Cans d’Andy Warhol 1962
- Nude with Skeleton, Marina Abramovic 2002
- For the Love of God’s de Damien Hirst 2007
- I like America and America likes me, de Joseph Beuys 1974
- Médecine Cabinets de Damien Hirst 1988
- Mother and Child (divided) d Damien Hirst 1993
- La Guerre (triptyque) d’Otto Dix 1929 – 1932
- Self-portrait with Skull d’Andy Warhol 1977
Vanité classique et vanité contemporaine, que retenir ?
Les vanités à la base sont destinées à rappeler le caractère imminent de la mort et à nous rappeler qu’orgueil et vanité ne sont qu’éphémères avec des principes religieux philosophiques et moraux stricts. On parle là des vanités classiques. Après les guerres dévastatrices, une nouvelle approche est née puisque la société était moins influencée par l’Église et un sentiment de défiance est né vis-à-vis de celle-ci. Les artistes ont donc remis en question toutes les croyances et tous les idéaux dogmatiques reçus ce qui a laissé libre cours à des peintures vanités plus osées avec plus de liberté d’imagination. Les vanités classiques et contemporaines représentent toutes les deux la mort, mais utilisent des codes et des idéaux différents.